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Al-Andalousi

Vers 1068 , à Tolède , Saïd Al-Andalusi composa la première histoire des sciences.

Nous tirons une citation fort  intéressante de son  traité «Kitab Tabakat al-Umama» . traduction. R. Blachère , Paris 1935.

La catégorie des nations qui a cultivé les sciences forme l'élite et la partie essentielle des créatures d'Allah. Ces nations, en effet, ont tendu à acquérir les vertus de cette âme raisonnable qui fait l'espèce humaine et en corrige la nature.[...]

Les philosophes hellènes sont les plus éminents des hommes par le rang et les plus grands des savants par le zèle véritable qu'ils ont montré dans les diverses branches du savoir: dans les sciences mathématiques, logiques, physiques et métaphysiqyes, ainsi que dans les sciences politiques qui traitent de la constitution de la famille et de la société.[...]

Au nombre des traits particuliers aux Perses se trouvent un goût extrême pour l'art médical et une connaissance approfondie de l'astrologie et de l'influence des astres sur le monde sublunaire. Ils possédaient d'antiques observations et des systèmes divers sur le mouvement des planètes. Parmi ces systèmes, signalons celui d'après lequel Abu Ma'shar Ja'afar ibn Muhammad ibn 'Umar al-Balkhi dressa sa grande table astronomique, prétendant que ce système était celui des perses et d`un grand nombre de savants de tous les pays.[...]

Lorsque la califat passa à Abd Allah al-Ma'mun ibn Harun al-Rachid ibn Muhammad al-Mahdi ibn abu Ja'afar al-Mansur, quand, poussé par son propre génie, ce prince désira connaître la philosophie, quand sa haute intelligence l'eut mis à même d'embrasser toutes les sciences philosophiques, quand les savants de son époque eurent pris connaissance de l'Almageste,quand ils eurent compris le dispositif des instruments d'observation décrit dans cet ouvrage, al-Ma`mun fut amené à faire venir auprès de lui, de tous les points de son empire, les hommes remarquables de son temps. Il leur ordonna de construire des instruments semblables, de s'en servir pour la mesure des astres et, à l`aide de ces instruments d'essayer de déterminer la position des étoiles, comme l'avaient fait Ptolémée et ses prédécesseurs. Ils firent ce qui leur était ordonné et, avec ces instruments ils livrèrent à des observations dans le quartier d'al-Shammâsiyya, (à Bagdad), et au mont Kâsiyun, dans la région de Damas, en Syrie, en 214/829. Ils déterminèrent la durée de l'année solaire fixée par l'observation, la valeur de l'inclinaison du soleil, l'excentricité de son épicycle, le lieu de son apogée. Ils parvinrent, en outre, à connaître certaines particularités du reste des étoiles errantes et fixes. La mort du Khalife, en 218/833, empêcha ces savants d'accomplir entièrement ce quìl avaient projeté, mais ils consignèrent les résultats auxquels ils étaient arrivés dans un traité intitulé ar-Rasad al-ma`muni (l`Observation-ma`munide). Ce furent les astronomes Yahya ibn Abi Mansur, premier astronome de son temps, Khalid ibn'Abd al-Malik al-maruzi, Sind ibn Ali et al-'Abbas ibn Sa'id al-Jawhari qui s'acquitèrent de cette tâche; chacun d'eux composa une table astronomique qui porte son nom et qui est entre les mains de tout le monde, aujourd'hui encore. Leurs observations furent les premières faites dans l'empire islamique.

Depuis cette époque jusqu'à la nôtre, quelques musulmans et non-musulmans admis dans l'ìntimité des califes`Abbasides ou d`autres princes mahométans, n'ont cessé de cultiver l`astronomie, la géométrie, la médecine et autres sciences anciennes; ils ont continué à composer sur ces matières des traités importants et à mettre en lumière des résultats curieux obtenus dans ces sciences[...]

À la fin de la première partie du quatrième siècle, le Kalif al-Hakam al-Mustanir bi-llah ibn Àbd ar-Rahmân an-Nâsir li-dîn Allah se prit à cultiver les sciences et à patronner les savants. Il fit venir (en Andalousie) de Bagdad, d'Egypte et d'ailleurs, en Orient, les ouvrages capitaux les plus importants et les plus rares touchant les sciences anciennes et modernes. Il en réunit à la fin du règne de son père et, par la suite, durant son règne personnel, une quantité presque égale à celle réunie par les princes 'abbâsides en un temps bien plus long. Cette tâche lui fut rendue aisée par son amour extrême pour la science, par sa grande ardeur pour acquérir toutes les vertues et par son désir de ressembler aux monarques sages. Tout le monde alors se prit à lire les livres et à étudier les doctrines des Anciens. Ce prince mourut en safâr 366/septembre 976.

Après ce Kalif, son fils Hisham al -Mu'ayyad bi-llah fut proclamé. Comme ce prince était encore mineur, son hâjib (premier ministre) saisit du pouvoir, en Andalousie. Il se nommait Abû`Âmir Muhammad ibn`Abd Allah ibn Abî`Âmir ibn Muhammad ibn`Âmir  al-Ma`âfiri al-Kahtânî. Dès qu'il fut maître de l'empire, Abû`Âmir se rendit dans les bibliothèques d'al-Hakam, père de Hisham, qui contenaient les ouvrages dont il a été parlé et d'autres, fit sortir toutes les espèces d'écrits qui s'y trouvaient, en présence de quelques théologiens, et ordonna à ces derniers de mettre de côté, à l`exception des traités de médecine et d`arithmétique, ceux des livres qui traitent des sciences anciennes: logique, astronomie et autres sciences cultivées par les Anciens.

Quand on eut séparé ces livres de tous ceux relatifs à la lexicographie, à la grammaire, à la poésie, à l'histoire, à la médecine, à la juriprudence, à la tradition, enfin aux sciences admises chez les Andalous (seul échappa ce qui se trouvait (confondu) avec ces derniers  écrits mais c'était peu de chose, Abû`Âmir commanda de brûler et détruire ces ouvrages traitant des sciences anciennes. Certains furent donc livré à la flamme; d'autres furent jetés dans les puits du Palais et enfouis sous de la terre et des pierres ou furent détruits de quelques manières .

Abû`Âmir agissait ainsi pour se concilier le peuple d'Andalousie et pour stigmatiser à ses yeux les principes du Khalife al-Hakam. Ces sciences, en effet, étaient mal vues des vieilles gens et critiquées par les grands. Quiconque les étudiait était suspect à leurs yeux d'hérésie et tenu pour entaché d'hétérodoxie. La plupart de ceux qui alors s'étaient mis à étudier la philosophie, perdirent leur ardeur, se terrèrent et gardèrent secret ce qu'ils savaient de ces sciences. Les hommes de talent de ce temps, jusqu'à l'effondrement de la dynastie Umayyade, en Espagne, ne cessèrent de celer ainsi leur savoir, et de cultiver seulement au grand jour celles des sciences qu'il leur était permis d'étudier, comme l'arithmétique, la science des partages successoraux (farâ`id), la médecine et quelques sciences militaires.

Au début du cinquième siècle de l`Hégire (XIe de J.C), l'empire fut partagé entre ceux à qui la chose fut possible. Des principautés se constituèrent et chacun de ceux qui en étaient maîtres prit pour capitale une des villes principales de la Péninsule. Cependant, l'attention des émirs régnant dans la cité la plus importante, Cordoue, détournée par l'apparition de ces principicules, cessa de s'attacher à persécuter et à poursuivre les savants. Les troubles forcèrent d'autre part à vendre les bibliothèques et tous les meubles que renfermait le palais de Cordoue. Cela fut cédé à vil prix et pour une somme infime. Les ouvrages de ces bibliothèques furent dispersés dans toutes les contrées de l'Andalousie. Parmi eux, on retrouva des fragments précieux de sciences anciennes qui avaient échappé aux mains de ceux chargés de la bibliothèque d'al-Hakam, au temps d'al-Mansûr ibn Abî'Âmir. De plus, tous ceux qui, dans le peuple, possédaient des ouvrages traitant des sciences anciennes montrèrent ce qu'ils détenaient.

À partir de ce moment, le désir d'apprendre ce qu'avaient su les Anciens, ne cessa de croître peu à peu, les capitales des principautés, de plus, jusqu'à notre époque, devinrent des centres intellectuels. La période actuelle - Allah en soit loué!- en ce qui touche la reconnaissances des sciences (anciennes) et l'absence d'entrave à leur développement , est la plus propice qui fût en Andalousie jusqu'au jour où les princes se détournèrent de ces sciences anciennes et autres. Malheureusement les esprits étant préoccupés par les maux dont souffrent les frontières du fait des chrétiens qui, d'année en année s'emparent des confins de l'Andalousie, - préoccupés par l'impuissance où sont les Musulmans de défendre ces contrées contre les envahisseurs, les hommes avides de science se font plus rares et ne sont plus que quelques-uns en Espagne.

Témoignage sur l'enseignement de la médecine à Bagdad au milieu du IXe siècle