L'orgue arabe en chine

Un document chinois du XIVe siècle relate l'envoi à l'empereur Shih Tsu (1) , entre 1260 et 1264 , d'un orgue relativement important par "les royaumes musulmans" (il s`agit probablement des autorités de Bagdad). Les descriptions fournies par les chroniques du Céleste Empire permettent de se faire une idée assez précise de ce qu'on savait encore faire chez les Arabes à cette époque : 

             Instruments pour musique de fête

  •   Hsing lung Sheng. Il est fait de bois de nan . Sa forme est celle d'un double paravent aigu vers le haut, mais avec une surface unie; incrusté de fils d'or, avec des gravures représentant des roses, des paons , des bambous, des arbres , des nuages et des brouillards. Des panneaux décorés sont disposés obliquement par rapport aux deux cotés, chacun d'eux occupant un tiers de la largeur du fond. A l'intérieur il y a une caisse creuse analogue à la chambre à air d'un sheng(2) . Au- dessus  se trouvent quatre- vingt-dix tuyaux de bambou rouge, fixés verticalement. Les extrémités (inférieures) sont garnies d'un étui de bois de mu-lien. A l'extérieur  du sommier font saillis quinze courtes tiges comportant de petits tubes verticaux; le bout de ces tubes est recouvert  de petites feuilles de cuivre  rouge. Au-dessous il y a une base entourée de lions et d'éléphants . Sur la base et en face du sommier se trouve un seul panneau décoré et gravé comme celui du fond. Deux bouches à vent font saillie entre ( ce panneau et l'instrument ) . Quand on veut se servir de l'instrument , on place un petit cadre laqué de rouge en face du pied et on fixe les soufflets sur les bouches à vent. Les tables de bois de ces soufflets, munies de poignées,  rappellent un peu le pì-p`a (luth). Un seul homme manipule les petits tubes , tandis qu'un autre actionne les soufflets : alors les anches résonnent naturellement suivant leur accord. L'instrument offert par les royaumes musulmans employait le bambou pour les anches et donnait des sons, mais pas des gammes. 
  • Cet orgue offert à L'empereur  Shih Tsu ne représente  pas le modèle unique construit par les facteurs arabes . Un auteur syrien , Josua bar Bahlul, décrit, aux environs de 963 quelque chose d'assez différent: :

            Il ya deux espèces d'orgues. Le premier a la forme d'un métier de tisserand; il est pourvu d'un grand nombre de  cordes (?) et on peut l'entendre à une distance de sept stades. Le second se compose de deux colonnes creuses et minces faites d'un marbre magnifique, disposées verticalement et agencées avec un art admirable. Au -dessous se trouvent des soufflets semblables à ceux des forgerons, mais plus petits et plus jolis. Celui qui joue est assis au-dessus et ceux qui exécutent le chant  quel qu'il soit se tiennent à droite et à gauche: on entend alors  un concert délicieux auquel rien ici bas ne peut être comparé. On dit qu'un tel instrument se trouve à l'église de Byzance(3).  

_________________________________   

  1 - Shih Tsu , n'est autre que le mongol Kubilai,  le propre petit fils de Genghis Khan. Il était t le protecteur des arts et des lettres.

  2 - Le sheng est un orgue à bouche     

  3- Traduit du syriaque en anglais par R. Payne Smith , Thesaurus Syriacus , Oxford 1868