Index de l'article

Al-Jazari

Dans son volumineux traité signalé à plusieurs reprise "Recueil utile de la théorie et la pratique des procédés ingénieux" al-Jazari consacre la première partie au genre (Naw') des horloges hydrauliques . Al-Jazari distingue deux catégories  de ces horloges :

1 - des horloges qui indiquent  les heures temporaires (al-sa'at al-zamaniyya) ou heures inégales 

2- des horloges qui indiquent  les heures égales (al-sa'at mustawiya)

À chaque genre il a accordé quelques modèles.

Premier modèle du premier genre de la première catégorie

C'est une horloge hydraulique qui indique les heures temporiare ou solaires

Aspect extérieur

L'extérieur de cette horloge représente une sorte d'édifice s'élevant à deux hauteurs d'homme et qui comprend tout le mécanisme de l'heure. Sur la façade, une grande porte de neuf empans (1 empan représente 22 à 24 cm.) de hauteur et de cinq empans et demi de largeur, est fermée par une paroi de bois ou de bronze. Au-dessus de celle-ci une rangée de douze fenêtres (T) sont au début du jour fermées par deux volets; puis au-dessous, douze portes à un battant (T') toutes de même couleur. On perçoit ensuite des moulures longitudinales d'un pouce de largeur (SS'), qui laissent passer entre elles une tige recourbée, portant à son extrémité un petit croissant lunaire tel un « dinâr » en or.

Au début du jour ce croissant se trouve à l'extrême gauche. Plus bas encore, et de chaque côté du cintre de la porte, deux faucons (B et B') aux ailes déployées, sont perchés à l'intérieur de deux niches, au- dessous desquelles sont posés deux vases (V et V') «Quandîl». La voûte de la porte est constituée par douze disques en verre. Au pied du monument, on voit cinq automates musiciens dans des attitudes diverses, deux sonnant de la trompette, deux autres roulant du tambour et le cinquième, au centre, jouant de la timbale.

Au faîte de tout cet ensemble, dans un vaste demi-cercle, paraissent les signes du zodiaque, montant de la gauche et disparaissant à droite. Puis, plus au centre, une boule d'or représente le soleil. Il se lève, c'est-à-dire apparaît à gauche au commencement de la première heure du jour et se trouve placé dans la constellation correspondant à la saison. Une autre sphère, en verre, donne l'image de la lune. Si les deux sphères sont situées l'une au-dessous de l'autre, cela signifie qu'on se trouve à l'époque de la nouvelle lune. Mais peu à peu la marche de la sphère lunaire retarde sur celle du soleil, si bien qu'à l'époque de la pleine lune, on voit celle-ci se dégager à gauche, au-dessus de l'horizon, au moment précis où le soleil, ayant terminé sa course journalière, disparaît à droite au-dessous de l'horizon. Comme dans la réalité, au milieu du jour, le soleil est au plus haut point de son parcours.

Fonctionnement                                                                    

Le fonctionnement de cette horloge est le suivant : au commencement du jour, le petit croissant d'or se met en marche d'un mouvement régulier vers la droite. Il passe devant la première porte et quand il se trouve entre la première et la deuxième, cela signifie que la première heure du jour est écoulée. C'est alors que les deux volets de la première fenêtre s'ouvrent, découvrant un petit personnage qui signifie l'heure écoulée. La première porte fait un demi-tour sur elle-même; elle présente son autre face qui est de couleur différente. Après ces premières phases, les deux faucons basculent et projettent chacun hors de leur bec une bille qui tombe dans chacun des vases, en produisant un son lointain. Puis les deux oiseaux se relèvent, et chaque fois qu'une heure est écoulée, ce jeu recommence avec toutes ses phases. A la fin de la sixième heure, puis à la neuvième et à la douzième, les musiciens entrent en action, jouant de leurs instruments.

La fin de la douzième heure annonce le commencement de la nuit. Toutes les portes se retournent, les personnages se retirent des fenêtres et les volets se referment. C'est à ce moment-là qu'une faible lumière apparaît sous la forme d'un petit croissant dans le premier disque de verre.

La lumière augmente de plus en plus et quand tout le disque est éclairé, la première heure de nuit est passée. Les autres sont indiquées par le nombre de disques lumineux. De nuit comme de jour, les musiciens font entendre leur vacarme à la sixième, à la neuvième et à la douzième heure. Il semble que les heures de jour et celles de nuit n'avaient pas la même durée et que l'homme chargé de surveiller l'horloge (remplissage du réservoir de la clepsydre, remise des boules dans les rigoles correspondant au bec des faucons) pouvait, par un jeu de robinets, faire varier la vitesse d'écoulement de l'eau et en même temps, la durée des heures suivant les saisons, la première heure étant celle qui suit le lever du soleil.

Cet aspect extérieur si sophistiqué nous incite à dévoiler le mécanisme  technique de son fonctionnement. À cette fin une étude technique détaillée de chaque élément est indispensable.


 

Aspect  intérieur

I- Description des éléments du mécanisme intérieur

1 - le réservoir d'eau principal 

D'après Al-Jazari, ce réservoir est formé de la superposition de quatre récipients identiques et bien jaugés . Le récipient étalon est formé de quatre plaque métalliques rectangulaires de dimension (1empan 3/4 de longueur  et1 empans 1/4 de largeur. Une plaque carré de 1 empan1/4 de côté forme la base. La hauteur de ce récipient sera graduée par dix trait équidistants. (figure ci-contre )

Une fois ces récipients construits, on garde l'un d'eux, qui jouera le rôle de base  du réservoir principal, on coupe les bases des trois autres , puis on les superpose sur le premier et on les fait souder solidement deux à deux. On aura ainsi un réservoir de hauteur sept empans. La quantité d'eau nécessaire au fonctionnement de  l'horloge étant de dix empans, on gardera alors un demi-empan vide pour le flotteur et au fond du récipient la quantité d'eau correspondant à la hauteur d'un demi -empan. Dans ce but le robinet doit être raccordé à une hauteur d'un demi-empan de la base du récipient.

Ce robinet en cuivre rouge est fixé au milieu d'un tuyau de même nature. L'une des extrémité de ce tuyau est fixé au réservoir principal tandis que l'autre est raccordé à un autre petit tuyau recourbé à angle droit dont le bout tronconique pourra être fermé par un bouchon métallique de forme conique.       

La surface libre de l'eau de ce réservoir doit recevoir le flotteur de la figure ci-contre muni de son anneau .

2 - Le réservoir régulateur ( appelé par Al-Jazari "al-rub'")

  C'est un petit réservoir à section carré de 8 cm de côté, et de hauteur 36cm.Il est muni d'un  tuyau horizontal auquel il faut raccorder le plateau des signes de zodiaque. (figure à gauche)

Son flotteur ayant la forme ci-contre est vide à l'intérieur et doit se maintenir horizontal à la surface de l'eau . Surmonté de son index ce flotteur peut jouer le rôle de soupape.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                flotteur

 3 - Le tuyau régulateur (appelé par al-Jazari "al-Jaz'a")

L'élément essentiel de ce réservoir est un robinet de forme particuliere. Il est   formé de deux pièces de cuivre jaune  qui s'encastre l'une dans l'autre. L'une d'elle vide à l'intérieure est la pièce femelle du robinet ; l'autre pleine forme la pièce mâle. Cette dernière doit tourner librement dans la pièce femelle une fois les deux pièces encastrée l'une à l'intérieur de l'autre.

La figure ci- contre montre, les deux pièces (A et B ) séparées surmontées des deux mêmes pièces encastrées l'une dans l'autre   

 

                                                                                                                                                                                                                                                       A                           B

La pièce mâle est perforée le long de sa longueur d'un canal qui donne accès à un autre canal perforé plus bas dans la même pièce. Ce robinet doit être soudé au dos et juste au centre du plateau des signes de zodiaque. Un tuyau, raccordé au canal de la base, longe un des rayons de ce plateau. Ce tuyau, à extrémité fermée, est percé d'un petit orifice qui coïncide exactement avec une ouverture pratiquée dans ce même plateau. Ainsi, l'eau qui traverse le canal du robinet n'a d'autre sortie que cette ouverture.

4 - Le plateau des signes de zodiaque

Ce plateau est formé d'un disque fixé au robinet du réservoir régulateur dont le tuyau  s'appuie sur une couronne gravée des  signes de zodiaque et des degrés nécessaires. Sur la face du disque centrale et tout près de l'ouverture, on fixe un index qui longe un rayon et dépasse le bord de la couronne . Diamétralement opposé à cet index on fixe un bouton qui sert de poignée pour faire tourner le disque. On entoure ce dernier d'une couronne porté par un support de sorte que le disque puisse tourné librement en son centre.   

        

          Le plateau des signes de zodiaque                              Le montage de l'ensemble

 

5 - Montage de cet ensemble

On construit un support en pierre sur lequel on fait monté le réservoir principal. Sur un support plus bas on monte le réservoir régulateur de sorte que l'index de son flotteur rentre exactement dans l'ouverture du robinet. On raccorde ensuite à ce réservoir régulateur, le tuyau correspondant muni du plateau des signes de zodiaque. Puis AlJazri explique sa méthode pour graduer le plateau des signe de zodiaque.


 

II - Description des éléments qui indiquent le temps écoulé

1- Les portes

On compte douze portes dont chacune est fermée par une plaque de cuivre rectangulaire mobile autour d'un axe  horizontal. Ce dernier n'est autre que son axe de symétrie. La moitié inférieure de cette plaque est alourdi par du plomb de sorte que si on l'écarte de sa position d'équilibre , elle revient sous l'action de son poids.

Au lever du soleil, chaque porte est tournée de 180° autour de son axe et est accrochée à une cheville fixée au mur. Dans cette position la moitié alourdie occupe sa plus haute position. Au passage d'une heure le croissant du chariot décroche cette cheville et la porte correspondante tourne de 180° pour reprendre sa position d'équilibre.

2 - Les fenêtres

Elles sont au nombre de douze dont chacune est à double volets . Ces derniers  s'ouvrent sous l'action de la figurine qu'ils  cachent. Chaque figurine représente un jeune garçon suspendu par  sa tête au milieu de la fenêtre et est étiré vers l'arrière par une cheville fixée à ses pieds. Ainsi dès que cette cheville est décrochée  la figurine tombe et pousse par se pieds les volets et apparaît comme s'il regardait vers le bas .

3 - Les canaux

Une planchette de bois de longueur égale à la distance qui couvre les douze portes, est divisée longitudinalement en deux parties égales. Dans chaque partie on a perforé douze trous dont le diamètre de chacun permet le passage d'une petite bille  de fer. À côté de chaque trou on a creusé un fossé allongé et peu incliné vers le trou. Ce dernier est séparé du fossé par une lame métallique mince fixée à une tige mobile autour d'un axe fixé au bord du canal. Cette lame retient les billes dans leur fossé. Pour libérer ces billes, il suffit de basculer la tige sur son axe pour écarter les lames vers le haut. Les billes se précipitent chacune vers son trou.

Un autre canal à double voies est fixé en-dessous du précédent. Il est concave et percé de deux trous juste au milieu de sa concavité . Ainsi toute bille qui tombe dans l'une des deux voies de ce canal se dirige nécessairement vers un trou.  Chaque trou du canal concave communique avec la tête du faucon par un long tuyau.

4 - Les faucons

Deux faucons métalliques à ailes déployées se trouvent encastrer dans deux petites chambres situées de part et d'autre de la machine. les pieds de chaque faucon  sont fixés sur tige mobile dans un plan vertical. Les ailes, aussi mobiles , sont attachées par leur bord au mur de la chambre. La tête du faucon est percée d'une  ouverture qui permet le passage de la bille à son bec. Sous l'action du poids de cette bille, le faucon se penche, ouvre son bec et crache la bille dans la coupe. Cette dernière porte en son centre un miroir métallique qui résonne sous l'action  du choc de la bille qui continue son chemin vers la chambre de rassemblement.

la tige qui porte le faucon est équilibrée par un contrepoids accroché à l'extrémité d'une chaîne. Lorsque le faucon se penche ses ailes se déploient lui donnant l'aspect d'un oiseau volant.

Al-Jazari précise qu'il est assez important de décorer le faucon et d'étamer ses ailes par une couche d'or.

5- le chariot

C'est un petit chariot monté sur quatre roues. Il est relié à la roue des heures diurnes par une chaîne qui passe sur la gorge d'une poulie fixe. Une autre chaîne le relie à  un contrepoids . Ce chariot porte une tige verticale qui se termine par un croissant en or . Ce chariot se déplace d'un mouvement rectiligne uniforme sur une planchette de bois dans laquelle on a creusé deux fentes parallèles qui jouent le rôle de rails pour les roues .


 

6- L'heure est aussi indiqué par des cercles qui s'illuminent.

 À cette fin , on prend un disque de bois de diamètre trois empans et demi. On le perfore de douze ouvertures circulaires et équidistantes qui se répartissent sur une couronne de 1/2 empan. Derrière ce disque on allume une lampe à huile .(figure ci-contre A) .

On considère d'autre part un autre disque identique au premier dont on a coupé la moitié d'une de largeur 1/2 empan. Cette couronne est remplacé par un arc de fer. Ce disque est centré sur un axe auquel est fixé une poulie de bois de même diamètre . C'est la rotation de cette dernière qui entraine la roue à arc pour dévoiler à chaque heure une ouverture illuminée. (figure ci-contre B).

                    

                   Montage du mécanisme principale avec les portes, les fenêtres, le chariot et les  disques.

 7- Description du mécanisme qui actionne les musiciennes pour indiquer le nombre des heures écoulées

Ce mécanisme se base sur la quantité d'eau écoulée du tuyau régulateur de l'horloge. Ainsi au-dessus de l'ouverture du tuyau régulateur, on place un plateau peu profond qui  peut tourner autour d'un axe vertical. Ce plateau est percé d'une ouverture à laquelle on accorde un long tuyau à extrémité recourbée.

On prend d'autre part un grand vase assez profond qu'on divise en deux compartiments superposés dont le plus bas est  muni d'un tuyau d'évacuation. On divise ensuite le compartiment supérieur en trois parties égales par des planchettes métalliques qu'on introduit verticalement dans le compartiment. On aura ainsi trois petits récipients identiques groupés l'un à côté de l'autre. On fixe au fond de chaque récipient une soupape dont la pièce mâle est reliée par une chaîne au dos des douze figurines de l'horloge.

Le premier sera relié à la figurine de la troisième heure, le second est relié à celle qui indique la sixième heure et le dernier sera relié à celle qui indique la douzième heure. Ces récipients seront placés au-dessous du tuyau qui reçoit l'eau du plateau mobile .

L'eau qui s'écoule de ces récipient sera dirigée vers les cuillères d'un disque qui fait tourné un axe sur lequel sont fixées des chevilles qui actionnent les musiciennes.

L'eau de ces cuillères s'accumulent dans un récipient pour se diriger à travers un tuyau vers un autre petit récipient à sifflet. L'air échappée de ce récipient fait fonctionné le sifflet au moment précis.

 

 

 

 

 

 Une description si détaillée , si précise permet de classer Al-Jazari au palmarès des ingénieurs techniciens du Moyen Âge.

http://sanjakdar-chaarani.com/new_sai_j3x/index.php/lesvideo-1

voir le vidéo de l'horloge reconstituée et animée par l'association 1001 inventions


Les horloges de Taqi al-Din